Nous avons entendu plusieurs fois des habitants de Fès ou des visiteurs s’étonner de ce que l’historique de la ville de Fès puisse être connu, et même avec certains détails et depuis une époque reculée.

Il ne faut pas oublier que la civilisation musulmane a connu une réelle grandeur pendant notre Moyen-Âge et qu’une ville aussi importante et lettrée que Fès ne pouvait manquer d’avoir de nombreux historiens. S’ils ne sont le plus souvent à la portée que des seuls arabisants, n’empêche que certains ont été traduits à l’attention du grand public.

Les sources les plus généralement connues de l’histoire de Fès (et relevées par Pierre Bach) se trouvent dans :
– le Roudh-el-Kartas (traduit par Beaumier en 1860)
– le Salouat El Anfas
– le Zahrat El Aas (traduction Fagnan)
– le Kitab El Istiqua (traduction Fumey, Graulle et Colin)
et pour revenir aux auteurs anciens :
– El Bekri, 1069 (traduction par de Slane)
– El Idrissi,1154, géographe du roi de Sicile
– Ibn Khaldoun, histoire des Berbères
auxquels il faut ajouter l’ouvrage en italien de al-Hassan ben Mohamed, dit Léon l’Africain, remarquablement commenté par Massignon en 1906 (et ré-édité en 2006). La « Description de l’Afrique » de Léon l’Africain de 1525 et le Kitab El Istiqua valent par les auteurs anciens qu’ils citent.

Mais à ces auteurs connus s’en ajoutent beaucoup d’autres moins célèbres, souvent pas encore traduits, dans les ouvrages desquels il faut « pêcher » les précisions intéressantes et nombreuses mais éparpillées, qui permettent de faire le point des précédents. Citons parmi les plus anciens, andalous pour la plupart :
– Ibn Saïd
– Moussa ben Mimoun dit le Maimonide – 1262
– Ibn Raqiq, auteur de Mizan El Amal
– Abou Bekr Er Razi, 1023, au sujet de la fondation de Fès
– En Naoufali, sur le même sujet
– l’ouvrage Ez Zahrat El Mantoura Fi Akhbar El Mantoura, et, en extraits dans le Kitab Mafakhir El Berber (donc antérieur à 1312)
– Abou Merouane Abdelmalek El Ouarrak
– Ibn Hamadou es Sebti
– Mohamed ben Abou Majid El Maghili

Il va sans dire qu’il en existe encore un grand nombre car il faudrait mentionner toute une littérature écrite en arabe.

Roger Le Tourneau dans son livre « Fès avant le protectorat » publié en 1949 propose sur 12 pages une bibliographie très complète des sources arabes, des documents en français ou publiés par les voyageurs européens.

La lecture de ces auteurs anciens montre que la ville de Fès s’est considérablement agrandie sous les Almohades. Les recensements de maisons et d’industries le prouvent, ainsi que l’élargissement des murailles en 1204. Et c’est, en partie, pour cette raison que les Mérinides créèrent Fès-Jdid en 1276.

En 1103, sous les Almoravides, les murailles de la ville ne s’élevaient pas jusqu’à la hauteur de la Kasbat El Anouar et la Talâa se terminait à Bab Asliten, à hauteur de l’Aïn Asliten, source captée mais bien connue en Médina. Il est intéressant de noter  que  depuis quelques années la muraille a été ré-ouverte à Aïn Asliten pour donner un accès plus rapide au cœur de la Médina …. accès que certains ont mis à profit pour rénover des maisons ou des riads pour les touristes : on n’a pas trop à marcher pour amener ses valises depuis le parking.

De même les agrandissements successifs de la mosquée-université de Karaouyine sont faciles à suivre dans les auteurs des différentes époques, depuis sa fondation sous Idriss II. La plupart des portes de la ville également ont été reconstruites à plusieurs reprises. Tout cela est mentionné par les auteurs et plus encore les crises politiques ou sociales qui ne manquèrent pas de se multiplier au cours des siècles, comme les épidémies et les famines.

L’histoire de Fès est très complète, les membres et les anciens élèves de l’université de Qaraouyine l’ayant écrite, pendant les nombreux siècles qui s’écoulèrent depuis Idriss II  et surtout depuis les premiers Mérinides (fin du XIII ème siècle). On le voit, les sources de l’histoire de Fès sont nombreuses et puisées au meilleur de l’intellectualité islamique.

Photographie à la une : vue de la médina prise d’une des grottes situées au pied de la butte des mérinides.